Abréger des scènes ou comment gérer le rythme narratif d'une histoire

Après une partie, les joueurs et moi avons eu une discussion intéressante sur le rythme d’une partie et notamment sur la durée des scènes. Il en est ressorti que pour avoir une partie plus dynamique, plus attrayante, des scènes plus courtes auraient mieux convenues.

C’est le drame de plusieurs parties que j’anime… Je souhaite des parties rythmées et haletantes mais le moindre obstacle fait durer la scène (même si l’amusement est là) : grosso modo, j’aimerais transformer mes parties de « un bon film de dimanche soir » à « une $@#" de partie d’enfer ! ». Du coup, je me demande comment faire pour réduire la durée des scènes, ou du moins avoir un repère qui m’indique qu’elles pourraient se terminer bientôt, tout en respectant la liberté des joueurs et l’agentivité des personnages (en gros sans faire des scénarios scripté où les PJ n’ont qu’à lancer des dés entre deux cinématiques).

Durant mes recherches, je suis tombé sur deux articles et je suis parvenue à la conclusion que l’un des moyens est de posez des objectifs clairs pour le MJ (même s’ils ne sont pas explicités à la table) et de mettre fin à la scène dès que celui-ci est atteint.

J’aimerai avoir votre avis sur cette conclusion et connaître vos astuces pour abréger les scènes.

La grosse question, c’est : Avec quel système joues tu ?

Chacun à ses facilités, mais on ne gère pas de la même manière (et les attentes ne sont pas les même) si tu joue avec un D&D like ou avec un PbtA…

Pour la partie en question, c’était avec The Sprawl.

Cependant, je rencontre cette difficulté quel que soit la mécanique de résolution utilisée.

Dans un pbta, le risque est grand de voir les scènes s’allonger du fait d’échecs ou de succès partiels : l’effet boule de neige peut être vite essoufflant pour toutes les joueuses et les joueurs à la table. (Ce qui n’était pas le cas lors de la partie qui a précédée la discussion que j’ai évoquée).

Une astuce que j’utilise c’est de donner des indices sur des éléments de résolutions aux joueurs.
Un joueur est très perceptif ? il va chopper des détails sur la personnalité le caractère la posture de l’interlocuteur.
Un joueur est un grand érudit et Magicien je vais lui en dire beaucoup plus la valeur d’une ressource ou les intentions politique lié à un phénomène magique.
etc
Pour moi ça fait partie des choses que les personnages savent, les joueurs en font ce qu’il veulent mais en général avec des « munitions » ils obtiennent plus facilement ce qu’ils veulent et ça accélère les résolutions.

La solution plus simple de proposer une clôture et demandant aux joueurs de passer en narration sur la fin de la scène me semble bien aussi

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Soit tes joueurs sont des drama queen and king et aiment passer 2 heures dans l’auberge à faire du RP pour commander une tourné de bière et dans ce cas, soit tu aimes ça et tu laisse faire, soit tu fait débouler les ninja (ou l’intrigue) au moment ou ça ronronne.

Soit c’est à toi d’être plus généreux, et comme le fait remarquer Pierre, de donner plus de billes à tes joueurs pour les faire avancer.

Et dans un PbtA il ne faut pas de statu quo, un 6- ou un 7-9 cela ne veut surtout pas dire que l’action s’éternise.

Il ne faut pas attendre le 10+ pour faire avancer l’histoire…

L’histoire avance à chaque fois… C’est juste que sur 10+ cela avance en faveur des joueurs et ils orientent très clairement le sens de cette dernière. Sur un 7-9 l’histoire avance en faveur des PJ, mais tu vas ajouter un petit quelques choses pour relancer la fiction.
Un 6- l’histoire avance, à fond, mais c’est le MJ qui décide de tout.

Mon exemple favoris : L’ouverture de la porte fermée à clef.

Si la manière la plus logique est intéressante de faire avancer l’histoire c’est d’ouvrir la porte, alors elle va s’ouvrir. L’enjeu n’est pas là. L’enjeu c’est « qui y a t’il derrière la porte ? ».
Sur 10+ ce sont les joueurs qui décident
Sur 7-9 ils décident, mais tu leur balance un nouveau rebondissement et ils n’auront pas se qui se trouve derrière la porte si facilement.
6- la poste s’ouvre, mais c’est le MJ qui décide le nouveau rebondissement, forcément problématique pour les joueurs, qui se trouve derrière.

En faisant comme ça, ton histoire ne peut pas piétiner.

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Pour ma part, je n’aurais pas de grands conseils a te donner.
Comme l’as dit @Mat avant moi, ca va dépendre des attentes de tes joueurs.
Si il veulent de l’action, offre leurs John wick, si ils veulent du drama, singe Riverdale.
Le plus difficile est de rester alerte.
Tu voit que tes joueurs commencent a changer de sujet, jouent avec leurs dés, sortent les mobiles .
Applique un move ! Déroule un front ! Sort les ninjas ! Balance un un secret de famille sur la table !
Et ce jus qu’as 2heure du matin ou tu va naturellement faiblir.

Aller je vais encore enfoncer une porte ouverte :
L’une des choses qui, à mon avis ou à mon goût, faire retomber le plus la sauce se sont les interminables débats où personne ne veut rien lâcher. Une question toute con, quelle soit tactique ou morale, peut vite se transformer en duel rhétorique sans fin qui débouche plus que souvent sur un concours de mauvaise foi voire une boucle temporelle (et même parfois sur un duel d’ego). Ces situations sont au jdr ce que les chaussettes dans les sandales sont à l’élégance.
Encore une fois, tout ce que j’écris ici n’est que mon avis et en aucun cas une règle ou une leçon !
Une de mes principales préoccupations quand je meujeute c’est d’être attentif à la façon dont se mettent en place les dialogues et d’essayer de désamorcer cette bascule qui fait passer la conversation du côté obscure de l’argumentation…
Il n’y a pas forcément de recette miracle mais en gros :

  • j’essaie quand la conversation se met en place de cerner qu’elle est l’attente des joueurs : se convaincre, jouer un moment de drama, chercher le lead, échanger des idées…
    C’est important quand c’est un PNJ qui est un des interlocuteurs de savoir, ce qu’attend le joueur de cet échange. Quand c’est entre deux PJs, ça me permet d’essayer de les aider à être en phase et de savoir quand la conversation n’apporte plus rien à personne mais qu’on n’arrive pas à l’arrêter (le fameux vortex temporel).
  • Pour aider les joueurs à « trouver une fin », il m’arrive de reformuler ce qu’ils disent de manière très simple. Ca leur permet parfois (même assez souvent) de se rendre compte qu’en fait ils disent la même chose et qu’il est vrai qu’on peut s’arrêter là :wink:
    Reformer simplement, permet parfois aussi au joueur de recentrer leurs désaccords et de trouver plus facilement un compromis.
  • Comme je fais pas mal de jeux dit « drama », je suis aussi super à l’écoute de ce qu’ils se disent pour pouvoir demander aux joueurs ce que ressent leur personnage à tel moment ou en entendant certains arguments. Le but est de les faire sortir du duel rhétorique où au final on se détache de la scène mais de revenir au personnage et à ce qui pourrait le faire agir. (ex « tu ressens quoi quand tu te rends compte que ton meilleur ami est en train de te parler comme si tu étais un idiot devant tout le monde ? »’ « Ca te fait quoi qu’on reparle de cette erreur qui date de 10 ans ! » « cette façon qu’il a de te parler ne te rappelle pas la façon dont te traitait ton père ? » etc…).
    Le but c’est de tendre des perches aux joueurs pour qu’ils puissent quitter un jeu l’échange verbal et passent à un jeu plus ressenti voire plus actif : qu’ils baissent les bras, trouvent un compromis, se foutent sur la gueule…
  • si vraiment c’est insoluble que personne ne veut céder, s’écouter… je demande une action PvP… ce qui est plus ou moins facile suivant le jeu.

Dans tous les cas, je conseillerai de ne jamais commencer une joute, un duel, un débat avec son personnage si on est pas prêt à céder en tant que joueur.

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Je vous remercie de ces précieux conseils :

  • faire avancer l’histoire quel que soit le résultat du dé (sur un pbta ou ailleurs),
  • donner un max d’information en fonction de l’archétype du PJ,
  • guetter l’ennui des joueurs,
  • veiller aux longueurs des débats.

Cependant, avez-vous des points de repères pour savoir que la scène s’éternise ? Qu’il est temps de faire intervenir les « ninjas » ?

Pour donner un exemple : dans une partie précédente, un PJ cherchait des infos pour préparer sa mission dans The Sprawl, alors il bat le pavé et fait un 6-. OK : son contact, un hacker, a un problème (coincé dans un hall commercial poursuivi par un groupe armé) et lui demande de l’aide. Par le truchement des dés (une avalanche de 6-), ce qui devait être une complication pour l’histoire a pris le reste de la soirée. C’était amusant (il y avait de l’action, du tactique, du suspens et peu de drama) mais, d’un point de vue utilitariste, peu opportun pour la mission (qui était à son tout début).

J’ai bien senti que la partie partait dans une direction qui n’était pas souhaitée par la tablée. Mais du coup, à quel moment aurais-je du abréger la scène ? Quand je me suis dit qu’elle trainait en longueur, il me semble que c’était trop tard.

Avez-vous des repères (narratif, méta, temporel) qui vous donne une appréciation de la « juste » longueur de la scène ?

Je ne suis pas certain de répondre exactement à ta question (d’autant que je n’ai jamais joué à the Sprawl…). Mais pour moi, le principe de PtbA « jouer pour voir ce qu’il se passe » est hyper important, du coup l’histoire s’éloigne de la mission n’est pas un problème… c’est même plutôt intéressant. Ensuite, il y a la nuance qui n’est pas un détail « la partie part dans une direction qui n’est pas souhaitée par la table ». Soit c’est certain que ce n’est pas ce que « la table » souhaite et (encore une fois je ne connais pas the Sprawl) il y a un certain nombre d’action de MJ qui permettent de faire des actions méchantes sans s’éloigner de la mission. Il y a aussi (je ne sais si c’est vraiment by the book) la possibilité sur un 6- de jouer la réussite et de garder un jeton en prévenant les joueurs qu’on lancera une action méchante plus tard dans l’histoire.
Mais encore une fois, que l’histoire parte dans une direction inattendue c’est plutôt chouette, non ? Il peut d’ailleurs être sympa de prendre un petit moment avec les joueurs pour en méta se dire « si on continue à tirer cette ficelle, la fiction nous entraîne là-bas. Est-ce qu’on essaie ou est-ce qu’on reste sur les rails ? »
N’hésites pas aussi, pour le rythme et tout, de faire des changements de plan, des ellipses, des flashbacks, etc… Changer la focal ou le côté linéaire de la narration chronologique peut donner du peps à ta partie.

Je n’ai jamais fait jouer The Sprawl.
Par contre, d’autres PBTA et du cyberpunk je connais :stuck_out_tongue:
PBTA est blindé de moyens de rendre une scène intéressante malgré les 6-
Pour reprendre ton exemple j’aurais procédé comme ceci:
6- Le contact de ton Pj est poursuivit par des hommes armés.
Second 6- J’aurais utilisé « Révéler une vérité indésirable ou consort. » Les hommes armés sont {insérer gang précédemment établit}, guidé par ton mortel ennemi {Insérer nom de PNJ antagoniste}.
6- La je devient hard, « Infliger des dégâts ». Le Pj est blessé pendant sa fuite, ses assaillants le suivent à la trace. Niak Niak
Admettons ton joueurs fait un autre 6- « Epuiser les ressources des Pjs », {PNJ antagoniste} suite a une longue tirade et une menace tue le hacker et laisse le Pj pour mort.

Avec juste des 6- on a une scène qui se tiens sans perde en tension dramatique.
Et en bonus une vengeance a accomplir, une épée de Damoclès en la personne du PNJ antagoniste et son nouveau gang et une fierté de Pj bafoué.
Hard boild à mort.
Je gage qu’après ca tes joueurs voudront en découdre.

Le secret est de varier et surtout de t’inspirer de tous les médias dont nous nous goinfrons quotidiennement.
Toutes les histoires ont déjà été racontés. C’est ta façon de raconter qui la rendras originale.
Ai foi en toi :slight_smile:

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En fait, @Alquen, c’est quasiment ce qui s’est passé (Tu étais à la partie ? J’avais bien senti une présence derrière mon épaule qui me soufflait les rebondissements :grin: ).

Après coup, c’est vrai que ça fait une super histoire ! Mais durant la partie, le fun était moins perceptible bien que le retour de la partie reste positif (je tiens à la rappeler).

Mon problème, si je peux l’exprimer autrement : j’adore jouer pour voir ce qui va arriver, j’ai envie de faire jouer une partie à la « mission impossible » et, pour moi, si je ne coupe pas certaines scènes, je risque de ne pas quitter le bâtiment du MI-6.

À la relecture de tous vos messages, je commence à comprendre où se situe mon problème. Je vous remercie beaucoup pour de tous vos messages qui font avancer ma réflexion sur la façon que j’ai d’animer les parties.

Il me tarde d’être à la prochaine partie pour tâcher de voir si j’ai vu juste (je n’arrive pas encore à mettre des mots sur la solution que j’aperçois). Je reviendrai vous faire un retour d’expérience sur tout ça (problème et solution mise en place).

Je débute dans la matirse via possession XD

Je n’ai pas encore eu l’occasion de MCer The Sprawl, mais je l’ai pas mal parcouru. Dans ton cas, où tu cherches à abréger la scène, j’aurais utilisé le principe :

Traitez vos PNJ comme des ressources jetables.
Ne protégez pas vos PNJ. Vos PNJ existent dans le seul but d’ajouter du drame et des complications à l’histoire que vous et les autres joueurs racontez. S’il y a une chose que m’a appris mon amour pour le cinéma hongkongais, c’est la valeur dramatique et émotionnelle d’une balle tirée au moment opportun en pleine tête du personnage secondaire que les spectateurs adorent. Tirez autant que vous le pouvez de potentiel narratif de vos PNJ, mais ne vous dressez pas sur le chemin des répercussions fictionnelles qui les visent ou des actions des personnages. Si les corpos sont prêtes à se débarrasser de ressources aussi utiles que les personnages, pourquoi se gêneraient-elles avec des individus qui ne représentent que des moyens de pression ? En tant que MC, faites de même.

Comme de toute manière, « Faites en sorte que tout soit lié aux corporations », tu as un hacker qui se fait flinguer par la corporation pour ce qu’il allait révéler. Ce hacker, c’était un des amis proches du PJ pas vrai ? Maintenant il va vraiment en vouloir à ces salauds (« Rendez les choses personnelles »).

Et la corpo, elle sait qu’ils se sont parlés juste avant qu’il se fasse flinguer (Action : « Montrez-leur le canon du flingue ») quand on voit un des assassins extraire l’implant de communication du hacker décédé. Il va falloir agir vite et lancer la mission sans trop d’infos avant qu’ils ne lancent une opération de repérage et nettoyage de toutes les personnes impliquées. Ou alors peut-être qu’un autre PJ a pu faire une scène pendant ce temps, ailleurs ?

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