La Difficulté

S’il y a une notion avec laquelle je tâtonne, en dépit du nombre croissant de parties menées, c’est bien celle de la difficulté.
Le fait est que je fais principalement jouer en improvisant au fil de l’eau, sans aucune préparation, et du coup… la difficulté d’une partie est souvent gérée au doigt mouillé. En faisant ce qui paraît juste. Voire selon l’inspiration du moment.

Pour ne pas avoir l’impression d’être trop arbitraire, et pour avoir la sensation de jouer moi aussi, j’ai fini par bricoler un petit système de combat qui me fournit également des règles à suivre et m’impose des limites avec lesquelles je peux travailler (acheter des actions / contraintes / monstres & compagnie, afin de ne pas juste faire sortir mes méchants du placard, mais payer afin de générer de l’adversité), mais ça reste encore globalement insuffisant.

Je n’ai pas de problèmes avec le fait que les joueurs vont parfois très bien se débrouiller, et pulvériser l’adversité sans transpirer. Ça arrive et c’est très bien comme ça.

Par contre, j’ai des problèmes avec le fait de générer un climat d’adversité. Les décisions que je peux prendre (à la volée) pour concrétiser cette difficulté peuvent parfois se révéler néfastes pour le rythme de la partie / le plaisir de jeu.
- Exemple : dans ma dernière partie, le méchant a jeté un sort et congelé le bassin dans lequel la plupart des joueurs se trouvaient. Vu la disposition de l’arène, c’était relativement évident que c’était pas une bonne idée de combattre dans l’eau. Mais du coup, je me suis retrouvé avec trois joueurs sur quatre qui galèrent pour se libérer / ne pas en mourir.
Et ça n’a pas spécialement créé une phase de jeu intéressante. Ça paraissait logique. Ça paraissait mérité. Et d’ailleurs, s’il n’y avait eu qu’un joueur à l’eau, le sort aurait été lancé de la même façon (pour des conséquences moins délicates).

Mais le résultat, c’est que j’ai démontré la difficulté du combat en « bloquant » certains joueurs, qui forcément, se sont moins amusés. Si je m’étais un peu creusé la tête, j’aurais pu trouver d’autres idées, créant de l’adversité (en les séparant, en modifiant les conditions de victoire…) sans pour autant amoindrir le plaisir de jouer.

En évitant, peu importe les stratagèmes que je mets en place, de rogner sur le potentiel d’action des joueurs.

Et vous, est-ce que vous avez une manière bien à vous de gérer la difficulté d’une partie ?
Des astuces que vous aimez mettre en place pour pimenter une situation ?

Existe-t-il des situations où vous livrez bataille honnêtement à vos joueurs ?
Ou alors vous cantonnez-vous au rôle d’arbitre ?

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Super sujet.
La difficulté est quelque chose de crutial et compliqué pour moi également.
Avoir un système de règle « fair » qui fasse le boulot ou qui t’aide à jauger est quelque chose de précieux.

La logique de « seuil » de difficulté d’un piège, les points de vies ou les dégâts d’un adversaire ne sont qu’une petite composante de la difficulté.
L’élément plus essentiel qui va impacter sur la difficulté d’une rencontre c’est « l’économie d’action » (Action economy)

En prennant deux (ou plus) groupes opposés et un objectif (vaincre, fuir, récupérer relique / parchemin A) le nombre potenciel d’action disponible pour chaque groupe constitue à mon sens le premier levier pour construire une rencontre et jauger sa difficulté.
(D’ailleurs ton exemple le montre bien, avec 3 joueurs momentanément privé d’action utile pour l’objectif la difficulté à complètement changé)

Par conséquent les décisions qui (pour moi) ont beaucoup d’impact sur la difficulté d’une rencontre sont :

  • Le nombre d’opposant (surnombre = plus d’action pour l’opposition)
  • Les joueurs ont t’il (peuvent ils) la surprise ? Sont ils supris (un round d’action gratos à dépenser)
  • L’opposition à t’elle un moyen de diminuer / limiter le nombre d’action des joueurs (via sort, piège, autre)
  • Les joueurs ont ils un moyen de diminuer / limiter le nombre d’action de l’opposition.

Quand on a un équilibre sur le nombre d’action à dépenser on peut passer à la qualité de ces actions pour affiner la difficulté.
Je vais avoir 3 d’action en plus par tour pour l’opposition mais les actions seront de qualité moyenne.
Ou alors je vais mettre un seul adversaire mais qui sera un « boss » de type « Gate keeper » va avoir des actions de riposte sur toute les actions « offensive » des joueurs mais pas d’action offensive (si l’objectif est de passer la porte il faudra réflechir autrement car vaincre le Keeper sera très difficile).

Malheuresement même avec ce genre d’indice / outil je me retrouve toujours à ajuster un peu à la volé / au doigt mouillé pour augmenter ou diminuer le challenge.

Ca veut dire lire les joueurs et leurs envies (est ce qu’ils ont envie d’en chier ou pas ?)
Donner un sentiment d’accomplissement (je vais les mettre sur les rotules mais le jeu en vaut la chandelle)
Et pour se faire j’ai tentance à préparer une rencontre simple et des surprises / évènements en plus au cas ou j’ai l’impression que les joueurs ont pas vraiment mouillé la chemise.
En général ça marche bien (j’ai l’impression que les joueurs ne voient pas de différence entre ce qui a été prévu et les ajouts).

Mais une chose est sûr quelque soit la rencontre diminuer le nombre d’action d’un joueur risque de créer de la frustration (même si c’est suffisament annoncé / téléphonné) donc j’ai plutôt tendance à en donner PLUS à l’adversité que limiter les joueurs (ex : vous vous rendez compte qu’il y a un shaman qui semble incanter dans le fond et que les Orcs semblent tous beaucoup plus rapide d’un coup !)

Voilà, voilà…je ne sais pas si ça sera utile ! Mais j’espère qu’au minimum ça pourra alimenter le débâts ^^

Tu parles pour un jeu D&D like là ?

De ce que j’en sais il y a deux écoles.

Si tu veux être « fair » tu triche sur les dés, pour « rééquilibrer » le jeu lorsque tu le trouves « unfair ».

Si tu veux être old school ben t’es joueurs morflent. Tant pis pour eux s’ils ne s’étaient pas renseigné sur le fait que ton boss était un spécialiste de la glace et que mettre ses pieds dans un bassin d’eau, ben c’était une mauvaise idée… Ils en paient les conséquences.

Perso aucune de ces deux approches ne me convient comme Mj… C’est pour ça que j’ai arrêté les D&D like.

Mais j’aurai plus de respect pour la version old school. Parce qui si tu joue avec des pv, des skill et des build de baston, ben ça fait partie du jeu de faire tourner ses méninges pour par se faire avoir comme des bleus gelé dans l’eau.

Par ailleurs pour être « dur mais juste », laisser facilement trainer l’info (ou des indices) que le Boss est un cryomancien, c’est la moindre des choses.

D&D m’a traversé l’esprit en écrivant ce message (et en bidouillant mon système de combat) mais non, je parlais en général. J’ai trop souvent eu l’impression que la difficulté d’une partie de jeu de rôle (à ma table / en impro) dépendait de ma vision du rythme et du fair-play. Et j’ai commencé à me lasser d’avoir un regard de « producteur » sur la situation.
De temps à autre, j’ai envie d’avoir davantage l’impression de jouer avec les autres. Donc, je me suis bricolé des règles d’adversité avec lesquelles je peux « combattre » moi aussi.

Avec mon système, j’ai des points d’adversité que je peux dépenser pour utiliser différentes actions. Dans l’idée (puisque je suis en improvisation), c’était pour ne pas sortir les rebondissements de mon chapeau. En pratique, si je dois dépenser 3 points pour modifier la condition de victoire ou 5 points pour utiliser l’attaque finale du boss sur l’équipe… eh bien ça dépend encore de mon interprétation.

Je me demandais donc quelle était votre approche, pour gérer la difficulté d’une partie.
Bien entendu, si contrairement à moi, vous jouez avec un scénario préparé et des PNJs/monstres ayant des stats bien définies, on ne partage pas les mêmes contraintes. Mais ça ne veut pas dire que vous n’avez pas de bons conseils à me partager, ou qu’il n’y a rien dont on puisse discuter à ce sujet !
= )

ps : mais on est d’accord pour le côté « dur mais juste » et les indices. Dans ladite partie, il y avait de la glace et de l’air froid partout.

Un peu comme @Mat j’ai arrêté ce genre de système parce qu’ils ne conviennent plus à ma façon de maîtriser.
Je préfère la difficulté « fictionnelle », qui peut par exemple se matérialiser par les enjeux d’une action, et pas forcément par le jet de dé. Dans un « Apocalypse World »-like, par exemple, le jet sera toujours 2D6+Carac, avec un résultat 6- (Ouch !), 7-9 (Oui mais), 10+ (Oui !). La difficulté n’est pas quantifié ni quantifiable dans le système, mais en tant que meneur, les conséquences d’un Mais ou d’un échec vont être plus lourdes quand le danger est plus grand, tout simplement.

Effectivement…

A part dans un D&D Like, où j’ai du mal à quitter le principe « d’affrontement avec attrition » donc où le facteur niveau du monstre et de l’adversité fait sens et où le MJ est quand même appelé à être arbitre et chef de l’opposition tactique. Pour tout mes autres JDR je ne me pose pas / plus ces questions. Le principe de difficulté n’a pas de sens, seul l’intérêt de la fiction prime. Il peut y avoir des rebondissements narratifs variés. Perdre un combat ou se faire geler dans l’eau n’en sont que des exemples. Ma réflexion alors n’est pas de me dire « zut les geler dans l’eau était une mauvaise idée, car ils ne peuvent plus jouer », mais plutôt « maintenant qu’ils sont gelés dans l’eau comment rendre ce moment fictionnel intéressant ? » La réponse peut être tout simplement se tourner vers les joueurs et leur demander « que faites vous ? » et si ils n’ont pas d’idée travailler ensemble pour résoudre ce moment. Car je pense que c’est là la différence. Je ne suis pas l’adversaire des PJ. Mais on joue ensemble pour que l’histoire, la partie soit intéressante. C’est pour ça je ne me suis jamais dis « je ne joue pas avec les joueurs ».
C’est pour ça que si mes joueurs sont bloqués dans la glace je n’hésiterai pas à leur demander s’ils n’ont pas accès à un briquet, une torche, un contre sort, un sort ou à un parchemin de feu, donc réfléchir avec eux. Et si aucune solutions ne vient et bien la fiction peut s’ouvrir sur bien des choses du :

  • l’adversaire s’en va en ricanant et le temps que la glace fonde, les PJ perdent du temps et doivent maintenant courir pour empêcher les plans du grand méchant ™.
    à
  • Vous êtes dans la glace vous perdez la notion du temps, puis peu à peu la glace fond vous êtes libéré sauf que… vous vous rendez compte que 100 Ans ont passé et que maintenant le monde a été modifié par la réussite du plan du grand méchant ™… Que faite vous ?

Donc pour moi la seule « difficulté » dans le JDR c’est de trouver le moyen le plus intéressant, original, logique de challenger la narration que le résultat des dés aura mis sur notre route à tous. Et pour ça il n’y a pas de recette, il faut juste faire appel à son imagination et ne pas hésiter à sortir de sa zone de confort et d’essayer des trucs pour voir se qui va se passer.

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J’ai peut être répondu un peu à coté du coup.
Car effectivement ta demande est plus axé sur des idées de « systèmes » pour ne pas avoir à faire de préparation tout en ayant l’impression de jouer à un jeu toi aussi.

Du coup ça me fait penser au système de gestion des « Vilains » dans 7th sea deuxième édition.
En rapide tu défini un « adversaire » sur deux caractéristique : influence et puissance. (qui vont de 0 à 10)

Un adversaire « influent » pourra agir de manière détourner en engageant des sbires, payant des pots de vin et comploter pour arriver à ses fins de manière générale.

Un adversaire « puissant » est un super-sbire avec des capacités spéciale dépassant beaucoup la force idividuelle de chaque personnage joueur, ce qui les forces à agir ensemble pour battre l’adversaire puissant. (sachant que le challenge n’est pas forcément un combat, le super sbire peut être un messager extrèmement rapide qui peut tenir 3 jours à cheval sans dormir (en changeant de cheval) ou être un espion ayant de redoutable compétence de déguisement qui surveille les joueurs et transmet leur déplacement / décision à leur insue, la différence avec « l’influent » c’est que le « puissant » peut agir par lui même.

Tu peux mixer les points entre puissant et influent pour composer ton adversaire.
Une autre « catégorie » d’adversaire dans 7th sea c’est les « montres » ils sont un peu construit comme des « adversaire » mais ils n’ont QUE des points en « puissance » et sont en général uniquement là pour une opposition de « bagarre ».

Je te met le bout du pdf qui concerne les vilains, ça demandera bien sûr de l’huile de coude pour en faire un vrai outils qui puisse te servir en jeu, mais de la ou je me trouve ça ressemble déjà plus à quelquechose de constructif.

EDIT : Il y a des exemples dans le pdf des actions que peut faire le vilain avec son influence, ça ne sera probablement pas adapté à ton settings mais ça pourrait t’inspirer. De plus il y a une liste de capacité spéciale pour les monstres qui sont très puissante en choisir une pour deux devrait être suffisant pour créer de l’adversité.

EDIT2 : En fait plus j’y pense plus je me dis que tu devrais essayer de mener une partie de 7th sea deuxième édition « by the book » la mécanique des « séquence d’action » et des « séquence dramatique » dans leur gestion colle assez bien à une scène improvisé ou le MJ joue (gère ses ressources la « réserve de danger » et ses vilains / monstre) ça demande de déconstruire le système pour en faire un outil facilement utilisable « à la volée » mais c’est ce que j’ai de plus proche en magasin.

Et vous, est-ce que vous avez une manière bien à vous de gérer la difficulté d’une partie ?
Des astuces que vous aimez mettre en place pour pimenter une situation ?

Je prépare un peu à l’avance les principaux conflits du scénario en prenant quelques notes rapides en rapport aux Objectifs des PJs (qui doivent être clairs).
Il faut faire la différence entre Difficulté et Conflit.
L’important c’est le Conflit. Car c’est de lui que découle l’émotion et les sensations des joueurs.

Dans ton exemple, les PJs immobilisés dans l’eau sont frustré de ne pas pouvoir jouer. Ils doivent vouloir s’en sortir (car ils ont un Objectif qu’ils veulent absolument atteindre). C’est là que les conseils pour mener une partie de Jdr donné par Kobayashi dans ses jeux sont très intéressants.
Il propose de toujours dire « oui » aux propositions des joueurs (Q: « Est ce qu’on peux casser la glace ?
R : Oui »).
Car l’important c’est la conséquence de l’action, qui apporte un autre conflit (« Tu te libère de la glace mais le froid vous engourdi, vous avec un malus à vos jet et vos ennemis approchent »).
Les PJs enchainent avec d’autres action, posent d’autres questions qui amènent à d’autres conséquences.
Et pour l’avoir testé, c’est flagrant la différence.
Dire en majorité « Oui » aux demandes des Pjs peut sembler difficile à gérer mais en fait cela donne une dynamique « d’en avant » à la partie. On s’appuie sur leur proposition et ils ont confiance car il savent que leurs frustrations ne restera pas. Et ils en redemanderons car ludique et sans danger.
Testé en jeu et validé.

Existe-t-il des situations où vous livrez bataille honnêtement à vos joueurs ?
Ou alors vous cantonnez-vous au rôle d’arbitre ?

Un peu des deux.
Pour moi, c’est la beauté du geste qui importe. La situation qui donnera le plus d’émotion aux joueurs.
Et sa passe par la surprise. C’est l’investissement du mj dans la partie qui peut faire la part des choses.
De toute façon le mj est l’arbitre, c’est une partie de son rôle.

Qu’est ce que l’honnêteté ? C’est de tuer un PJs quand il se fait toucher en réussite critique par un PNJ ?
C’est délicat. Ca dépend de l’univers du jeu : réaliste ou pulp, picaresque ou épique.
Je préfère toujours permettre au PJ de survivre mais avec une conséquence ou un compromis (perte de quelques équipements ou de PNJ allié).

Pour résumer, c’est la formule Personnages + Objectifs + Obstacles = Conflits donc Émotions, qui permet de mettre de l’intensité dans un scénario sans se compliquer avec la Difficulté.
C’est la base de la dramaturgie, qui est l’art(isanat) de raconter des histoires, ce que nous faisons en pratiquant le Jdr.
Je sais pas si tout ça fait avancer le débat mais c’est agréable de participer.

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