Peut-on être un homme, hétéro, cis-genre et original?

Lors de ma dernière entrée, je parlais de sujets que j’avais du mal à évoquer et que pourtant je souhaite partager avec toi derrière ton écran.
J’ai mis du temps à verbaliser tout ça. Mais sur les conseils de @David et @Nitz (je ne mourrais pas seul !), je pose un sujet au combien brulant sur la table.

En préambule, ce que j’aime quand je suis joueur, c’est créer et incarner le plus d’avatars différents possibles.
Que ce soit par la physique, le vécu, la ligne de conduite, l’idéologie … etc
J’aime enfiler tour à tour la peau d’un ouvrier pleins de remords pour avoir été fidèle à un régime dictatorial ; d’un jeune batard moitié indien qui veille avec bienveillance la famille heureuse de sa prostitué de mère ; ou d’un bourgeois anglais complétement déconnecté des réalités des plus démunies que lui.
(Attention, j’ai aussi mes tropes. Pour t’amuser cet été, je te propose un bingo Alquen. Coche un point s’il parle, de radioactivité, de la guerre moderne, de rapports aux enfants, de sociétés qui aliènent une population. Si un de ces sujets vire à la diatribe socialiste, double ces points)

Par contre, j’ai toujours peur de potentielles avatars avec un sexe, genre ou orientation différente.
Non pas par fainéantise mais par peur de ne pas être juste dans mon jeu.

J’aimerais incarner une femme. Mais comment le faire quand tu ne peux qu’imaginer les pressions subies autour de leur corps, la tradition, les différences d’éducations et autres pressions inimaginables que je ne puis soupçonner.
Je me suis déjà essayer à jouer un homosexuel ou un bisexuel. Néanmoins, je n’ai pas réussi à dépasser le statut de l’anecdote ou du casus belli. Et comment pourrais-je aborder l’incompréhension de l’entourage, les subtils changements dans les codes de séductions ou du couple. Quand je n’ai connu que la norme.
Enfin, la notion de transgenre, genre-fluide et autre m’est complètement incompréhensibles.
Pas comme un vieille oncle réac, mais plutôt comme un type qui a demandé à ce qu’on lui explique, lentement, calmement. Et son cerveau a fait erreur 404, hors de mon domaine de compréhension.

Je sais que le sujet est trop vaste et complexe pour être abordé dans son intégralité ici.
Je lance simplement un appel pour ceux qui désirent parler ensemble de comment vous aborder la question lors de la créations de vos PJs et les pièges à éviter qui vous font tomber dans au mieux la caricature.

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C’est un sujet intéressant et tes questions le sont tout autant.

Pour me les avoir posé il y a quelques années, j’ai eu le déclic lorsque l’on m’a conseillé la chose suivante : joue ton personnage de la même manière, c’est à dire avec le même degré de sincérité / immersion / « ce qui te convient à toi pour t’amuser ».

Ça semble trop simple sur le papier, il n’en reste pas moins que pour moi ça a fonctionné.

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Waouh. Quel sujet. Je trouve super de se la poser. Rien que pour ça je te remercie et je suis heureux d’avoir la chance de te connaître.

Je suis également un homme, hétéro. Je ne sais pas si l’étiquette cis-genre ne me gratte pas un peu, en tous cas je survis avec mon genre masculin sans grande souffrance.

En jdr, perso je ne mets pas trop la pression. Le jeu de rôle n’a pas pour vocation, selon moi, de reproduire la réalité, mais plutôt d’expérimenter les émotions d’un personnage différent de ton toi de tous les jours (définition tout à fait personnelle, et encore tous les jeux ne sont pas raccords à cette définition). A aucun moment on ne peut prétendre à la perfection, mais simplement à essayer de penser, de ressentir différemment le monde. Si on s’autorise pas à essayer, eh bien, je trouve ça dommage.

Bien sûr qu’il faut faire attention aux autres joueuses, éventuellement aux spectacteurs si on fait un actual play. Mais il me semble que l’important c’est d’en parler : avant la partie, pendant la partie, après la partie. Mais l’envie d’essayer l’altérite est très belle, très légitime, et aucune censure ou auto-censure ne devrait l’empêcher.

PS : un homme blanc hétéro cis-genre CSP+ qui ne ressentirait aucune culpabilité aurait à la fois mon admiration et une certaine suspicion. Mais je crois qu’on a été élevé.e.s dans cette culpabilité, et qu’elle ne nous apporte pas que des bonnes choses. Et, comme le disait Tchouang-tseu, là où s’efface la culpabilité débute le jeu de rôle ! (enfin, il aurait pu le dire, il était rigolo Tchouang).

4 « J'aime »

Je suis assez d’accord avec Matthieu.
La première chose pour ne pas tomber dans la caricature c’est la sincérité : n’essaie pas de plaquer des éléments qui font « ce que devrait être le personnage », joue-le comme le sent, comme tu l’imagines comme tu le ressens avec l’autorisation de te tromper (ce qui ne veut rien dire, on est d’accord).
Chaque personne,chaque personnage est unique : il n’y a pas de critères universels qui définissent un homosexuel, pas plus que de critères universels qui définissent un hétéro, un homme une ou femme, un riche ou un pauvre…
Et, ce que je vais écrire va sans doute paraitre très con : ne joue pas avec des pincettes ou en t’excusant.

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Ah ! Ce @Matthieu_B toujours juste :slight_smile:
J’ai récement eu une expérience de jdr enregistré ou j’avais choisi de m’imposer un petit défi, de jouer un personnage féminin avec de la force de caractère mais aussi de la fragilité sans tomber dans les clichés habituel.
L’expérience fut très enrichissante et j’ai réalisé quelque chose au court des séances…
Je n’ai jamais vraiment approché le personnage comme « une femme qui… » mais comme « une personne qui … »

Comme d’habitude je peux me tromper, mais j’en suis arriver à un point ou je pense que homme, femme, homosexuel, hétéro, bi, transgenre etc ne sont pas si différent que ça les un des autres.
Dans le fond nous cherchons les même chose et avons les même désire, passion, émotion.

Bien sûr nos personnalité vont varier, nous n’allons pas être a l’aise avec tout les sujets mais fondamentalement nous sommes proches.
Nous allons avoir meilleur disposition quand on nous parle poliement que lorsqu’on nous aboie dessus… (c’est extrèmement bête mais finalement je pense que c’est assez vrai)

Mais comme la si justement rapporté @Matthieu_B « joue le avec sincérité » ce médium reste un jeu, je ne pense pas qu’il faille chercher plus loin que ça.

Et merci pour cette question @Alquen :wink:

4 « J'aime »

Typiquement le genre de sujet où il ne faut pas se monter le bourrichon à mon avis.

Tu peux jouer des personnages féminin tout aussi variés que ceux que tu évoques ici. A mon avis, là où ça coince, c’est que ton premier réflexe semble être de vouloir résumer et/ou enfermer le personnage dans une problématique que t’inspire son sexe. Ce que tu ne sembles pas faire systématiquement lorsque tu incarnes un personnage masculin.

Bref, mon conseil, c’est d’éviter de vouloir trop « typer ».
Après, pour aller plus loin, on peut effectivement discuter et voir s’il y a des bons procédés pour explorer telle ou telle problématique particulière, mais sinon (surtout si la démarche commence avec l’intention de se montrer respectueux), je ne crois pas qu’il soit nécessaire de se prendre la tête sur le sujet.

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Comme les autres, je trouve ça cool que tu te poses la question @Alquen :slight_smile:

Je rejoins @Matthieu_B dans ce qu’il dit et je vais en rajouter une couche sur l’intervention de @Pierreuh : je pense que n’importe quelle personne douée d’empathie est capable de jouer n’importe quel personnage.

Après, la façon dont tu l’interprètes est évidemment liée à l’univers et tu ne joues sans doute pas une femme du XXIe siècle d’un pays industrialisé et développé comme une aviatrice soviétique de la Seconde Guerre mondiale soumise à sa hiérarchie et au mépris des hommes de l’époque (je prends cet exemple parce que je suis en plein dedans, campagne de Night Witches oblige ^^). Les thèmes liés à l’oppression des femmes sont beaucoup plus présents dans le second cas. Ce qui ne veut absolument pas dire que les hommes ne peuvent pas s’en emparer, bien au contraire, c’est une fenêtre sur des thèmes forts qui à mon avis peuvent toucher n’importe quelle personne sensible et soucieuse de justice sociale (la preuve en est que je joue ma campagne de Night Witches avec trois joueurs et que c’est intéressant et chouette à la fois !)

Je rajouterais que ce n’est pas parce qu’on joue une femme en jeu de rôle qu’on est tenu de faire œuvre de perfection. J’ai déjà joué des caricatures d’hommes comme de femmes et ça aussi ça peut être drôle dans le bon contexte avec la bonne table.

En fait, ça me semble beaucoup moins dangereux de jouer une femme au final que de jouer un homme qui reproduit les oppressions faites aux femmes.

Quoiqu’il en soit, l’important pour moi est de continuer à se remettre en question comme tu sembles le faire.

Je ne me sens pas de parler à la place des LGBTQ+ ou des personnes racisées sur la façon d’interpréter une personne LGBTQ+ ou racisée, étant moi-même une femme blanche cis hétéro.
Ceci dit, je peux parler de ma pratique de joueuse. Je joue de tels personnages et j’aime ça. Premièrement, ça injecte un peu de diversité dans le JdR, ce qui n’est pas un mal. Deuxièmement, ça m’ouvre des horizons dans le monde réel pour me déconstruire et réfléchir à la place qu’on devrait laisser à toutes les diversités de s’exprimer.
En effet, selon moi il y a beaucoup à apprendre de ses personnages (en bien ou en mal) et vice-versa :slight_smile:

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Avant tout, un grand merci à tous pour vos retours et votre bienveillance.
Il est trop rare de pouvoir aborder ce genre de sujets avec une communauté aussi en or.

En effet, @guillaumejentey . Tu as mis le doigt sur quelque-chose. Selon toute vraisemblance mes soucis de confiance en moi m’entravent dans mon RP.
Je ferais bien de me lâcher un peu plus et de mettre de côté ma quête de toujours jouer plus juste et mieux.
Pour du « Die n retry » qui me permettrais de tester plus de choses, d’apprendre de mes erreurs et approximations.

Ce qui va dans le sens de tous les autres témoignages et conseils (notamment ceux de @Virevolte et @Pierreuh ).
Je fais surement l’erreur, de voir mon personnage comme « la pistolero ultra féminine BISEXUELLE » alors que je devrais « jouer pour voir ce qui va se passer » et ne pas forcer le trait.
Si la séduction, ou l’amour s’invitent à la partie autant évoquer le sujet, sinon ça resteras une anecdote.
Après tout, tout le monde aime Gandalf. On a pas la moindre idée de ses préférences sexuelles mais là n’est pas le propos de la fiction.

@macalys , cache donc ce jeu qui me fait envi que je ne saurais voir.
Ma bourses a déjà suffisamment des dernière promotions de l’été XD
Par contre l’empathie, n’est pas mon fort. Je compense cette carence par un brin de psychologie.
J’espère que cela suffiras.

Cette discussion me donne envie de tenter prochainement l’aventure avec ces personnages forts différents.
Je vous rassure le bingo Alquen reste d’actualité.

Je voulais rebondir sur le sujet.
Car en ce moment j’ai une lubie. Lorsque je suis MJ et que le cadre est bien loin de l’historique ou du contemporain, j’essaie d’établir des contraintes sociales très différentes.
Par exemple développer plus de matriarcat dans les sociétés que je propose, y modifier les rapports des forces entre les sexes, imaginer de nouveaux standards pour ses habitants etc …
Es que d’autres MJs tentent l’expériences et quels sont vos retours ?

J’en profite aussi pour remercier une de mes joueuses pour ses conseils avisés en termes de harcèlement sexuelles.

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Le questionnement… est un début de réponse !
La difficulté de cet exercice dans le JdR, est que les personnages jouables / proposés dans beaucoup de jeux reposent sur des stéréotypes. Dur de sortir des canons du genre, mis à part certains jeux expérimentaux.
Par contre, le GN permet souvent cette liberté et renforce l’immersion, pour autant qu’on sache s’affranchir de cet autre carcan qu’est l’apparence…

1 « J'aime »

Comme ça a déjà évoqué, le plus important est d’essayer de rendre justice au personnage et de l’incarner avec honnêteté, et éviter qu’il soit seulement défini par ce trait.

Et ne pas hésiter à faire des recherches pour éviter les clichés, on dispose de nombreux moyens pour cela :

  • Parler avec une personne ayant le trait en question, écouter son expérience et lui demander ce qu’il faut éviter de dire ou faire.
  • Avec internet, on peut trouver de nombreux témoignages et ressources, on peut suivre des gens d’horizons différents sur Twitter par exemple, trouver des articles et blogs, dernièrement je suis tombé sur ce blog donnant des conseils sur comment incarner une personne d’une origine différente ou cet article sur sur le white privilege.
    Evil Hat a aussi mis en ligne récemment le Fate Accessibility Toolkit contenant des conseils pour aborder avec respect les situations de handicaps, c’est différent des questions de genre ou d’orientation, mais c’est une démarche intéressante et importante car les handicaps sont souvent utilisés de manière problématique en jeu.
  • Enfin de nos jours, on dispose de nombreux medias. Si la représentation est encore loin d’être parfaite, ça s’améliore avec des personnages ouvertement queer et qui ne sont pas seulement définie comme l’ami gay du personnage principal. Au cinéma, il y a beaucoup à faire concernant les gros films, mais Marvel lors de la phase 3 a produit Black Panther et Captain Marvel, le prochain Thor verra Valkyrie se chercher une reine en faisant la première super-héroïne lgbt+.
    Les séries tv ont un peu d’avance, on trouve de nombreuses séries abordant ces sujets comme One Day at a Time (qui aborde les questions d’identité, les ptsd, l’homosexualité), Sense8, Brooklyn Nine-Nine, Tales of the City, Gentleman Jack et beaucoup d’autres (en super-héros, Supergirl, Black Lightning, la future Batwoman, Legends of Tomorrow).
    Il y a aussi beaucoup de webseries très intéressantes comme Carmilla (une série sur le surnaturel avec des personnages queer) ou Twenty (des tranches de vie d’une musicienne lesbienne à LA).
    Il y a aussi des webcomics, j’ai découvert dernièrement Dissent l’histoire d’un magicien dans un monde fantasy où on brûle les sorcières et qui va se retrouver à devoir soigner le prince maudit par une sorcière.
    J’arrête là ma liste, mais on peut facilement en trouver plus.
6 « J'aime »

Bonjour, je ne me suis pas encore présenté mais le sujet me tient à coeur, je réponds donc à brûle-pourpoint.
Je te remercie d’avoir posé la question de façon aussi fine et respectueuse.
Je pense que comme tu l’as dit toi-même: personne ne sait les préférences sexuelles de Gandalf. Il se trouve que Ian McKellen est homosexuel. Il ne joue pas à l’hétérosexuel: il joue comme il est.
Je pense qu’un premier pas, c’est justement de jouer Gandalf comme un être humain et un magicien. Si un homme dont il pourrait tomber amoureux apparaît dans la fiction, décide s’il tombe amoureux, ou pas. Sinon, ce n’est pas grave que son orientation sexuelle ne se manifeste pas. Combien d’hétéros as-tu joué sans qu’ils tombent amoureux au cours du jeu?
à tout prendre, tu pourrais même lancer ton personnage sans sexualité préméditée, et décider en cours de jeu que, paf, ce pnj-là, t’as envie que ton perso en tombe amoureux. Est-ce que ton perso savait qu’il était homosexuel avant? ou bien si la personne dont il tombe amoureux est une femme, peut-être que ton perso se vivait jusqu’à présent comme homosexuel, comment le vit-il?
Oui, joue pour voir ce qui va se passer!
c’est le meilleur « service » à rendre à la cause LGBT et à la cause féministe: ne pas penser un homo / une femme en fonction de sa sexualité. Joue-les comme des gens. Quand tu joues un autre rôle, tu ne commences pas par te dire « alors, je joue un homme hétérosexuel et c’est un point fondamental de sa personnalité ». Non, tu te dis, c’est un ouvrier, un médecin, etc. Pourquoi les « autres » (femmes, homos, noirs…) seraient-ils différents de toi à cet égard?

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Parce qu’on parle de catégories d’individus victimes d’oppression (à des niveaux différents bien sûr) dans à peu prêt toutes les sociétés connues, oppression dont nous mâles cis blancs ne subiront jamais les conséquences dans nos vraies vies. Si c’est un thème que l’on veut aborder dans nos parties, si l’on veut tâcher de créer de l’empathie, c’est bien le seul moyen.
Bien sûr, il ne s’agit pas d’entièrement définir ce personnage de cette manière, il y a des tas d’autres caractéristiques qui peuvent s’avérer très intéressantes à expérimenter, mais si on veut jouer avec le thème de l’oppression, il faut faire apparaître ses mécanismes dans la fiction, à travers les personnages, qui la subissent à cause de caractéristiques spécifiques. (tu cites l’exemple d’ouvriers, on pourrait parfaitement mettre en scène une oppression de classe, la violence des relations de travail, etc)

3 « J'aime »

Gary Gaygax me patafiole.
Ce sujet est tellement populaire que ce fieffé Volsung nous vole nos sujets de débats.

Pirate XD

Plus sérieusement je suis très fière d’avoir donner l’impulsion qui a donner un merveilleux débat.
Et m’as donné pleins de nouvelles idées et envies pour mes personnages.
Merci à vous et surtout merci à toi derrière ton écran.

@Alquen : si tu veux parler de son 2d6+sharp ep2, je cris « non ! » :smiley:
L’enregistrement date du 1er avril. C’est toi qui fait rien qu’à copier :slight_smile:
( ce qui serait bien entendu impossible vu la date de publication de la vidéo)

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D’accord, mais je me dis que réduire un opprimé à son oppression n’est pas franchement une preuve de respect.
Ensuite, je pense que l’oppression n’est pas une qualité intrinsèque, mais le résultat d’un rapport de domination: le racisme n’existe que parce que l’environnement est raciste. Si le cadre de jeu ne met pas en scène l’oppression (à travers les actions du MJ ou des PJ), il n’y a pas d’oppression, donc un RP basé sur le sentiment d’oppression sera ressenti comme totalement illégitime. Sauf si tu demandes au jeu de t’opprimer pour pouvoir jouer ton rôle d’opprimé… mais là, c’est doublement artificiel.
Enfin, je ne sais pas si un mâle cis blanc ne subit aucune oppression. Certains mâles cis blancs ne subissent aucune oppression, peut-être. Mais je pense qu’il serait plus juste de dire que le mâle-cis-blanc-de-classe-moyenne qui subit une oppression n’a ni le tourment ni le réconfort de la subir en tant que membre d’un groupe social. Parce que c’est quand même un réconfort de savoir qu’on a des compagnons d’infortune (maigre, certes - mais il suffit de l’accepter pour se rendre compte que quand on parle de communautarisme, on dit juste de la merde: c’est évidemment normal de se soutenir entre opprimés).

HS perso

Par contre, je pense qu’on peut traiter des préjugés; je crois d’ailleurs que toutes mes campagnes tournent autour de ce thème, involontairement: « s’ils sont ce que l’on dit, pourquoi n’agissent-ils pas comme tels? » est une question pivot dans mes campagnes - enfin, ça devrait, mais bizarrement…

Je ne peux pas m’empêcher de mettre en scène un PNJ qui a les attributs du grand méchant canonique (un sorcier en cape noire, des orques « sanguinaires »), mais pas plus - et de laisser le soin aux joueurs de juger sur les faits et pas sur l’apparence. Eh bien, ça n’arrive pas souvent.

@Alquen ce que tu décris, c’est le « fardeau de l’homme blanc »:
ton mérite est de combattre l’injustice sans la subir :wink:

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Je suis désolée je déterre ce sujet parce que je trouve la question, et les élèments de réponse, très pertinents.
Je voulais ajouter une pierre a l’édifice avec cette question :
est-ce qu’il est pas étonnant que les gens trouve plus de facilité à incarner des dragons ou des races félines/elfes, des hommes des cavernes ou des trolls, quantité de choses plus éloignés d’eux en termes d’expérieence de vie que celle que peut avoir une femme comtemporaine d’eux plutôt que cette dite femme ? c’est pas une question piège mais c’est un peu rhétorique parce que j’ai déjà une opinion : je pense qu’il s’agit de l’enseignement qu’on reçoit que « les hommes et les femmes c’est pas pareil, c’est tout » et du manque de représentation de personnages feminins, racisés, non heteros, dans les livres, les jeux, les films, les pubs, les discours politiques. Spoiler : c’est un piège, les différences sont culturelles, organisées, le crime profite à quelqu’un.

a ce sujet de la représentation : ce thread super https://twitter.com/Les_Intervalles/status/1255450959150559232

a propos de JDR : cette proposition de jeu, Dram Askew, qui propose de réflechir justement à cette question de légitimité à incerner, de souci de justesse, de peur de mal faire, etc. https://www.cestpasdujdr.fr/dream-askew/

Merci pour ce sujet, j’ai aimé vous lire, cette auberge virtuelle semble regorger de réflexions intéressantes.

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Pas de soucis j’aime bien déterrer des choses moi aussi.

J’avoue ne jamais avoir vu la question sous cette angle et je trouve ça super pertinent.
Je pense que le souci vient que personne n’as jamais vu de centaures pour dire « un centaure ne réagirait jamais comme ça ».

Par contre de part chez moi il est plus simple de trouver le représentant d’un sexe opposé.

Puis le sujet peu plus facilement devenir brûlant que « la condition féerique »

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Chouette, un zombie.

Merci pour l’article sur Dream Askew, j’ai envie d’y jouer maintenant, c’est malin.
Mais, j’ai un mais.

Je réagis à la réponse de l’auteur du blog sur la peur de mal faire, sur une microbroutille: explorer l’infinie variété des catégories et du nuancier LGBTQIA+ en se documentant: les butch, les queer, les hard femmes, les violent femmes (ah non merde, c’est un groupe de musique). Hey, c’est pas une famille botanique avec ses genres, ses espèces et ses sous-espèces! C’est des gens qui aimeraient bien qu’on les accepte comme des gens normaux, pour la plupart.

Par principe je n’aime pas trop le catalogue de délimitations fines qu’une certaine fraction militante de la communauté LGBTQI+ cherche (de mon point de vue) à imposer.
Déjà je trouve que c’est un critère normatif essentialiste (bam, point Godwin direct, chui comme ça, moi, sans préliminaires, t’as vu?). Je ne vois pas pourquoi on devrait absolument se caractériser en référence à ce référentiel, je trouve ça assez violent en fait:

  • ok, est-ce que je suis un bear parce que j’ai des bourrelets et des poils? manifestement… oui… mais est-ce que c’est un choix? j’aimerais peut-être bien être un éphèbe longiligne, c’est de la grossophobie de me réduire à mon apparence, quelque part. Et, oui, je me rase pas souvent, mais quand on s’aime pas, c’est pas évident de prendre soin de son apparence. Et puis quand je suis rasé on voit davantage mon gras sous le menton.
  • au premier abord je suis 100% butch, sauf que j’ai eu un mec, et quand il m’a larguée pour mon ex (cette greluche) j’ai chialé comme une conne pendant 8 jours, et que 2 ans après je rêve encore qu’il revient, mais en vrai j’ai la trouille; parce que s’il voulait me reprendre je sais bien que j’aurais aucune fierté, parce que je suis comme ça, coeur de loubard, une vraie merde. Chui dans quelle case, du coup? je suis quand même une vraie butch ou je suis juste une pauvre conne pathétique?
  • je suis homosexuel et commerçant de droite / prêtre catholique, où est ma place dans votre « arc en ciel »? (non, faites pas semblant, y en a pas, de place! et je vous parle pas du skin nazi, y en a autant qu’ailleurs, si le fait d’être queer protégeait de la connerie ça se saurait)
  • je suis un homme cis gay, mais marié à une femme, que j’aime et avec qui j’ai une petite fille. Il y a 5 ans ça me paraissait inconcevable, et c’est toujours le cas. Suis-je queer? en tout cas, je ne me sens pas bi, les femmes ne m’attirent pas. Mais ma femme, si, pourtant c’est pas un camionneur. C’est grave Docteur?
  • je suis agriculteur, et je déteste tous ces petits cons efféminés et drogués qui viennent bousiller nos champs avec leurs rave party et leur musique de sauvages. Il disent que je suis « gay », mais je vois pas le rapport avec Christian et moi, nous on sait se tenir, on se fait pas des papouilles en public comme des malpropres (j’t’en foutrais des rave party, ça se voit qu’ils se sont jamais levés à 5h pour la traite ces ptits cons)

On pourrait rallonger la liste assez longtemps, je parle de situations réelles à peine romancées (j’ai omis les plus violentes).
Ce que je veux dire, pour avoir côtoyé le milieu militant LGBTQIA+, c’est que beaucoup de gens en ressortent quelques années après y être entrés (comme moi du reste). Parce que la « communauté » correspond en réalité à une phase d’éveil de la conscience, et s’accompagne d’hyper activisme et de prises de position extrêmement radicales, qui sont normales (l’ardeur des nouveaux convertis) mais rarement tenables sur le long terme (sauf à tourner le dos à l’infinie subtilité de la vie). Bref, il ne faut pas confondre l’écume et la vague.

Et du coup, je suis de plus en plus sceptique sur la « communauté LGBT », qui me semble le fait d’une avant-garde activiste. C’est un outil de revendication politique efficace, mais c’est aussi un lisseur; je ne suis pas sûr que ces catégorisations apportent plus de bonheur que d’angoisses (mais c’est peut-être une question de caractère, certains aiment peut-être entrer dans des moules, je ne sais pas).

C’est très bien ces approches militantes, mais je me méfie tout autant de l’effet carcan des catégories en jeu. J’en ai rien à cirer de savoir si mon perso est une « cold femme » ou un « butch queen ». ça peut servir de base mais fondamentalement, je n’ai pas envie qu’on me dise: « attends, un butch queen ne réagit pas comme ça ». Un butch queen, c’est possible, mais mon perso est unique, okai? Qu’on me demande comment sa réaction est cohérente avec l’identité que j’ai définie, parfaitement, c’est normal. Tant que la réponse peut être: « elle est incohérente, parce que mon perso n’est pas un androïde, mais un être humain, pétri de contradictions (Okai?) ».

Mais bon, je pousse une gueulante en mode « vous allez vous lâcher la grappe les uns les autres bordel », mais je suis pour quand même.
(et je trouve que les moves en diceless, c’est top. Pour moi c’est le stade suivant de l’évolution du jeu de rôles, j’en ai rêvé, d’autres l’ont fait)

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Un magnifique sujet, que je souhaiterais compléter par une parole très juste d’un rappeur qui s’appelle Euphonik « Y’a peut-être un amalgame auquel tout le monde contribue
Car avant d’être une femme, je suis un individu » cela s’applique à tout le monde. Avant d’être homo ou trans on est quelqu’un et on ne se définit pas uniquement par notre sexe ou notre orientation ou non orientation sexuelle. Tout le monde peut être tout le monde. Tes personnages n’en seront que plus beaux et bien au delà car tu as la curiosité, l’envie et le respect.

7 « J'aime »

Je débarque et lis tout ce qui a été dit jusque là, donc ça va être long. Et encore je répond à la question de départ :

Je suis moi-même à peu près tout sauf un homme cis hétéro. On pourrait rajouter à la question le fait d’être intersexe ou diadique (j’y reviens après).

Comme déjà très bien dit, l’important est de jouer une personne, pas un genre, une sexualité… Une des astuces pour ça est de choisir ces éléments en derniers. Dans la plupart des cas, ça ne change pas fondamentalement le vécu ou autre du personnage. Donc quand on établi sa personnalité avant, le choix du genre ne doit rien changer. Encore moins l’orientation. En fait, choisit ton orientation (et tu très bien prendre hétéro 19 fois /20 puisque c’est ça correspond à la réalité de notre monde : pas besoin de sur-représenter). Puis la joue pas spécialement. Peut-être que jamais dans le scénario l’occasion se présentera où ça aura la moindre importance. Et la situation se présente, c’est surtout aux autres de décider comment y réagir en premier lieux. Si la personne MJ montre une austérité des PNJ face à un comportement/allusion de ton perso homo, ou face au fait que c’est une femme qui semble mener le groupe, tu pourra à ce moment là réagir en retour. Mais si MJ et PJ ne réagissent pas spécialement, pas de raison pour toi de tenir compte de la chose.

Quand au fait d’être trans ou cis. Si tu ne comprend pas trop ce qu’est être trans : ne te force surtout pas !

Je parlais d’intersexuation : en fait selon l’univers les sexes peuvent être +/- différents d’IRL. Un peu comme pour la question trans, quand on ne connaît pas le vécu trans mieux vaut simplement s’abstenir. Idem donc pour l’intersexuation, surtout que l’univers du jeu peut fondamentalement changer ce vécu (pas de chirurgie ou hormones qui peuvent être imposées, ou au contraire médecine ou magie qui offrent des possibilités tout autre + différence politique vis à vis de cette question). En revanche on peut très bien jouer un personnage hermaphrodite simultané dans un univers medfan ou une espèce ET qui change de sexe avec l’âge dans une univers SF. Dans ce cas il faut essayé d’imaginer comment c’est vécu, en particulier l’absence de certaines implications : dans mes exemples ce serait a priori des peuples qui ignorent complètement le sexisme (s’ils ont toujours été hermaphrodite). Attention cela peut être très intéressant (enfin je trouve personnellement), mais n’a pas de rapport avec l’intersexuation et encore moins avec la question intersexe dans notre monde IRL.

Autre point (quoi que) : ne pas chercher à tout prix la diversité. On peut garder certaines caractéristiques pour ses divers personnages, que ce soit une éthique, une sensibilité, un trait de personnalité. Perso, je peux jouer divers sexes, genres, orientations. Ça me plais même de faire un coup une lesbienne ostracisée révoltée, un autre coup un mec hétéro complètement avec une vision bien binaire qui n’imagine même pas que l’homosexualité existe. Je peux jouer un personnage trans, inconnu comme tel des autres PJ (jusqu’à ce que pour soigner une blessure au thorax on découvre que j’ai la poitrine bandée par ex). En revanche, actuellement, je ne me sens pas de jouer un personne qui vit ou a vécu un sentiment amoureux. Peut-être qu’un jour je jouerai (dans les 2 sens du mot) ça. Mais pour l’instant ce qu’il reste de part de moi dans mes perso (potentiels) bloque là dessus. Un peu comme pour jouer un perso trans quand on ne comprend pas, je ne pourrais pas jouer le sentiment amoureux avec sincérité.

Car en ce moment j’ai une lubie. Lorsque je suis MJ et que le cadre est bien loin de l’historique ou du contemporain, j’essaie d’établir des contraintes sociales très différentes.
Par exemple développer plus de matriarcat dans les sociétés que je propose, y modifier les rapports des forces entre les sexes, imaginer de nouveaux standards pour ses habitants etc …
Es que d’autres MJs tentent l’expérience et quels sont vos retours ?

Pas en tant que MJ, mais en tant que personne créatrice d’un univers medfan, j’ai aussi cette tendance. J’ai commencé à décrire tout ça, mais ça n’apporte rien à la question. Surtout que pour l’instant c’est juste dans le lore du jeu en cours d’écriture (et en partie dans ma tête). Je n’ai donc aucun retour là dessus. Pour d’autres univers, par exemple futuristes, ou le premier univers que j’envisageais pour mon jeu, c’est très présent. Mais là c’est beaucoup lus facile de jouer un perso dans une société patriarcale relativement classique, qui ignore tout du matriarcat des Gobelin ou de l’hermaphrodisme du peuple polaire ordinairement qualifié de démons. Ça permet aux personnes joueuses pas à leur aise avec ça de jouer une perso ‹ classique › dans une société ‹ classique ›. Important, je pense de laisser cette porte de sortie, du moins si tu veux un jeu ou/et la façon de l’animer plutôt ouvert. Tu peux aussi chercher les personnes qui sont d’accord avec ça et alors y aller plus fort.

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